Suzanne Valadon au Centre Pompidou, une dernière exposition avant les grands travaux. L’exposition parisienne est dans la continuité de celle de Pompidou Metz qui a eu lieu en 2023, Suzanne Valadon. Un monde à soi * J’al dessiné follement pour que quand je n’aurais plus d’yeux j’en aíe au bout des doigts » Suzanne Valadon (1865-1938) Au départ, elle était modèle et s’appelait Maria, elle deviendra l’artiste Suzanne Belle, intelligente, et surtout déterminée, elle gagne sa vie en tant que modèle. Rebaptisée Suzanne par son amant Henri de Toulouse Lautrec en référence à Suzanne et les vieillards un clin d’oeil, soulignant l’âge respectable des hommes qui l’entourent : Puvis de Chavanne, Degas, Renoir, Henner… Dans l’atelier, le temps de la pose, elle en profite pour observer le travail des maîtres. Aux côtés de Toulouse Lautrec, elle dessine, elle est talentueuse et Degas l’adoube « Vous êtes des nôtres !». Degas lui enseignera ensuite la gravure. Ses dessins sont merveilleux , elle représente ses proches très souvent car pas les moyens de s’offrir des modèles professionnels, son fils apparaît souvent et il y a André Utter, son amant, le peintre au caractère sombre, violent, il n’hésite pas à lacérer les toiles de Suzanne. On le retrouve en Adam, la feuille de vigne a été rajoutée un peu plus tard pour que le tableau puisse être exposé au Salon. Car Suzanne ose et n’hésite pas à représenter les hommes nus de face dans leur totalité, elle les peint sur des grands formats ! et devient la première femme artiste dans l’histoire de l’art qui aura des modèles masculins restés interdits aux femmes pendant très longtemps. Les rôles sont inversés, non seulement elle, une. femme modèle apprend à peindre et passe ainsi de l’autre côté du chevalet mais elle bouleverse les codes. Le parti pris de l’exposition est très classique sans véritable surprise, il débute par son autoportrait de 1883, année de la naissance de son fils, La chambre bleue, première acquisition par l’état français, les portraits s’enchainent, la salle consacrée à ses maîtres qui l’ont inspirée. Suzanne crée un style, elle est une star dans les années 20, ses portraits reflètent cette modernité, dans les poses, les vêtements , ce tableau La dame au petit chien retient mon attention. personnage androgyne enveloppé dans un sublime tissu, homme ou femme ? Un doute subsiste. Sur les cimaises les toiles, portraits, nus féminins peints dans leur intimité, la toilette, les attitudes lascives, les décors théâtralisent la scène, tissus, mobilier sont très recherchés et témoignent de cette époque. Puis on les attendait, les fameux nus masculins, même si c’est une révolution dans le monde artistique, ils me déçoivent, je préfère de beaucoup sa vision des femmes, son regard tendre sur elles, on a ce sentiment de les comprendre, d’accéder au coeur de leurs secrets. Suzanne est une féministe, avec elle la femme n’est plus fatale et son oeuvre rappelle celle d’une autre artiste Alice Neel (1900-1984), icône du féminisme militant qui a beaucoup peint les femmes. Cette exposition se veut un. dialogue avec les autres femmes artistes de l’époque qui ne me semble pas vraiment nécessaire , même si j’ai apprécié Juliette Roche et son très intéressant autoportrait habillée en homme. Suzanne Valadon est une grande artiste et je n’ai pas compris l’intérêt d’inclure d’autres noms à ses côtés comme si elle avait besoin d’un soutien extérieur pour exposer à Pompidou. Suzanne Valadon est aussi le symbole de la vie artistique de Montmartre, avec son clan, il faut regarder le Portrait de famille, où elle se figure entourée de Maurice Utrillo, André Uttar et de sa mère en 1912. Son atelier-appartement était au 12, rue Cortot à Paris, nous le connaissons car il est devenu le musée de Montmartre, on peut y visiter son atelier et son appartement et profiter de ce merveilleux jardin qu’elle a peint. Il reste beaucoup à dire sur le travail de Suzanne Valadon, étonnement, peu de chercheurs se sont penchés sur son travail, sur sa modernité, ce n’est pas l’artiste du XIXe, elle enjambe le XXe siècle et apporte la nouveauté, l’avant-garde et j’aime sa liberté. Dernière exposition à voir avant la fermeture cet été jusqu’en 2030. Le Centre Pompidou sera alors hors les murs avec des évènements à Paris au Grand Palais, en province, à l’étranger, les oeuvres voyageront et participeront au programme Constellation qui incarne cet esprit d’échange et de partage. Suzanne Valadon Centre Pompidou Jusqu’au 26 mai 2025 Commissariat Nathalie Ernoult, attachée de conservation au Musée national d’art moderne ; Chiara Parisi, directrice du Centre Pompidou-Metz ; Xavier Rey, directeur du Musée national d’art moderne Photo : Suzanne ValadonAutoportrait, 1916. Huile sur carton fin contrecollé sur toile, 43 × 34 cm Collection Douglas Green
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